L’école, construite dans les années “50”, a fait place nette pour le nouveau projet. Quelques anciens se souviennent.
Nous aurions pu être des centaines sur la photo, avec à chacun ses souvenirs d’écolier dans son époque. La nôtre fut celle des années “60”. De Gaulle était président, les chanteurs lançaient leur tube à la radio… La télé, le téléphone, les voitures et l’eau du robinet étaient rares dans les maisons. Yves, Maryse, Régis, Gilbert, Danielle, Bernard ou Christian sont venus pour saluer l’école de leur enfance ; celle que Robert Doisneau a immortalisé dans ses photos, que Gérard Lenormand a chanté dans “Matins d’hiver” ou que Jacques Prévert a évoqué dans le poème du “Cancre”. Nous allions à l’école à pied en ces temps, par des chemins champêtres, souvent. Il neigeait les hivers et nous marchions dans les pas des aînés qui nous ouvraient le chemin. Après le coup strident du sifflet, filles et garçons se rangeaient en rang par deux, devant les perrons de nos classes respectives. Nous avons connu les poêles à charbon, à bois ou à fioul qui ronronnaient au fond de la classe. Il y avait les pupitres à deux places, reliés par un banc, surmontés à droite des encriers en porcelaine. Au fond des casiers, on trouvait des images obtenues après quelques bons points de récompense. On écrivait nos leçons d’une belle écriture articulée à la plume Sergent-Major, avec ses pleins et ses déliés, les buvards colorés absorbaient les tâches. Il y avait les leçons de morale, et les grandes cartes en couleur qui illustraient les cours d’histoire et de géographie. La veille, les instituteurs préparaient l’encre, avec une poudre violette diluée dans de l’eau. En ces temps aussi, l’école de la république châtiait les élèves trop rêveurs ou indisciplinés. Certains, comme Bernard Curvale pense qu’on le méritait, d’autres ont évidemment pardonné, mais aucun n’a oublié ! Je me souviens d’équations insolubles, avec des robinets qui fuyaient sur des baignoires trouées. L’angoisse me nouait le ventre ! La veille des grandes vacances, les bois sentaient bon la cire d’abeille. Les élèves de service accomplissaient les corvées : à la cantine et dans les classes pour le nettoyage des parquets et des encriers ; alors, l’eau coulait bleue dans les lavabos du préau. Il y avait nos jeux de billes et de ballons, la marelle pour les filles, chat perché, le saut à la corde, etc. Telle était, succinctement, l’école de notre enfance qui nous a construits et instruits.
Article rédigé par Daniel Carrière, paru dans la Dépêche du Midi le 17 janvier 2023